Histoire et patrimoine
La situation géographique
La commune regroupe un ensemble de hameaux étagés à mi- pente de la montagne de l'Homme qui culmine à 2176 m. C'est un village alpin typique, au cœur du massif de l'Oisans, en bordure de la haute vallée de la Romanche, sur la rive droite.
Très bien exposé, en plein midi, bien au-dessus du fond des gorges de l'Infernet, la commune se compose aujourd'hui de sept ou huit villages ;au XIX° siècle, lorsque la démographie était à son maximum, on en comptait une douzaine dont certains n'abritaient que deux ou trois habitations.
-->Hameaux : Les Chatains, La Ville, La Balme, Le Cert, L'Eglise et la Forêt (1950)
Cette situation présente un inconvénient majeur : les villages ont été
très longtemps d'un accès difficile. Jusqu'au début du XX° siècle le seul accès se faisait par le « chemin de la cheminée ». C'est un sentier éprouvant qui débute au fond de la vallée, à 750 m , pour atteindre la Balme, 1239 m, après ses trente-deux lacets , certains très courts et très pentus. Sa magnifique exposition lui permet de n'être que très rarement impraticable en hiver.
Les Châtains, La Ville, Les cours et la Montagne de l'Homme (1955) <--
« La Cheminée » et les hameaux de La Balme et des CertsCette difficulté d'accès présente aussi un avantage : les habitants sont épargnés par « routiers » du Moyen Age ou les armées qui se rendaient en Italie et qui se nourrissaient sur la population.
Les origines historiques
1° L'époque romaine
Situé à proximité de la voie romaine qui reliait Turin à Vienne en passant par Suse, le col du Montgenèvre, Briançon, le col du Lautaret et Grenoble, Auris devait être desservie par une voie secondaire beaucoup mieux ensoleillée que la voie principale qui passe par Mont de Lans.
Certains noms de hameaux : Les Cours, La Ville ont probablement une origine gallo-romaine.
Des pièces de monnaies romaines auraient été découvertes au hameau de la Ville (des monnaies de Trajan et d'Antonin) et également sur le « chemin du Pape » entre Maronne et Cluy. Une pièce en bronze à l'effigie de Néron a été découverte assez récemment dans le village des Châtains.
Dès 1076 la paroisse Saint Julien d'Auris
La population atteint un maximum d'environ 340 habitants (si on prend l'hypothèse de 4,5 personnes par feux) avant la grande épidémie de peste noire qui sévit en Oisans de 1350 jusqu'au XVI° siècle. Pour l'époque, cette population est importante, certains démographes parlent de surpopulation. Il faudra attendre le milieu du XVII° siècle pour retrouver la même population.
3° L'ancien régime
Pendant près de deux siècles, entre 1600 et la révolution, la communauté d'Auris (on écrivait alors Oris ou Orrys ou Aurys) est bien organisée, stable, peu touchée par la réforme protestante (Monseigneur Le Camus, ne détecte que trois familles hérétiques lors de sa visite en 1686).
L'administration est confiée à un Consul (et son substitut), élu chaque année au mois d'Août, devant l'église, par les chefs de famille payant un impôt suffisant (taille)
C'est une période de grande religiosité, encadrée par des curés qui occupent leur ministère pendant de nombreuses années (entre 1654 et 1793 seulement six curés : 39 ans, 26 ans, 38 ans, 3 ans, 9 ans, 29 ans). C'est à ce moment que se construisent ou se rénovent les chapelles dans les hameaux ; en 1720 l'église paroissiale est profondément modifiée et agrandie.
Comme dans les autres communautés de l'Oisans, Auris compte quelques riches marchands, établis dans le centre de la France ou en Bourgogne. Ils ont gardé des liens étroits avec leur pays de naissance et y reviennent régulièrement pour s'investir dans la vie de la communauté.
Les notaires jouent un rôle important dans la vie de la communauté : entre 1550 et 1820 Auris à pratiquement toujours eu un notaire royal. La charge se transmettait de père en fils (Arvey, Piera-Pierre, Ponce)
Sans doute, depuis l'époque des Dauphins, les habitants sont devenus propriétaires des terres qu'ils cultivent (ils continuent cependant à payer le « cens » au Seigneur jusqu'à la Révolution). Les terriers et regest (équivalent des cadastres et matrices) existent et sont conservés, pour Auris, depuis le XVI° siècle.
Ce fut une période assez agitée à Auris. Le curé Augustin Vieux fut un des cinq « prêtres réfractaires » de l'Oisans ; ce qui ne calma pas les choses.
L'administration subit de profond changement : les notables qui administraient la communauté (consuls) cèdent la place à des personnalités nouvelles.
Comme ailleurs, l'argenterie et les objets de culte précieux de l'église furent vendus, ainsi que les meubles et ornements d'église, jusqu'aux bancs et estrades !
Les cloches des chapelles et de l'église sont descendues et envoyées à Grenoble pour être fondues ; une seule subsistera à l'église.
C'est l'époque où la démographie explose pour atteindre son maximum en 1851 : 780 habitants.
Dès 1820 on assiste à un développement extraordinaire du nombre de colporteurs (rares sont les familles qui n'en n'ont pas un ou deux). Ce sont souvent de jeunes hommes (frères, cousins, parfois oncle et neveu) qui partent à partir de Toussaint la balle sur l'épaule pour plusieurs mois. Certains ne font ce métier que quelques années, mais d'autres le feront jusqu'à un âge avancé. Leurs destinations de prédilection sont la Bourgogne, l'Auvergne, le Limousin ; certains iront tenter leur chance en Amérique (St Domingue, Mexique) et parfois réussiront.
--> Une balle de colporteur de la fin du XIX° siècle
Ces colporteurs sont très différents des marchands du XVII° ou XVIII° siècle ; ceux-ci étaient riches, tenaient magasin, souvent grossistes alors que les colporteurs (mercerie, draperie, ferblantiers, lunetiers) étaient généralement issus de famille modeste (ils devaient souvent emprunter pour remplir leur balle !) et revenaient au pays, au printemps, pour les travaux agricoles. Les derniers colporteurs (lunetiers) ont continué leur activité jusqu'au début du XX° siècle.
Démographie<--
--> L'intérieur de l'Eglise après la restauration de 1892
6° Le XX° siècle.
Le début du siècle est marqué par la construction de la route de la Roche entre l'Armentier le Haut et Auris. Ces travaux impressionnants, entre 1897 et 1902 permirent le désenclavement de la commune. Auris est enfin relié à la civilisation par une route carrossable.
La route en construction (1890) <--
--> La route au début du XX° siècle (1920)
La station des Orgières en 1974<--
Denis VEYRAT